L'homme sur le banc

Publié le par lacomtesseauxpiedsnus.over-blog.com

 

 

 

Jacques sur le banc 2

 

 

 

 

 

 

J’avais déjà croisé Jacques un lundi morne où j’errai sur le Faubourg, en quête d’énergie. Entrée dans un square près de Faidherbe, posé sur un banc, il me lança un bonjour expressif. Premier sourire de la journée.

J’arpentais le square, cherchant des visages anguleux à photographier ; je ne trouvais que bandes de mecs occupés à dealer et clodos vissés sur des bancs, entre rêve éveillé et réalité brumeuse.  Je repensais à cet homme qui m’avait dit bonjour avec une chaleur inhabituelle, et retournais à l’entrée du square pour faire son portrait. Comme souvent, il n’était plus là. Je quittais le square à regret, frustrée par cette rencontre avortée.

 

Je croisais de nouveau Jacques un dimanche d’ennui, en rentrant de la laverie. De nouveau, ce fut lui qui m’aborda. Assise sur un banc dans un square de la rue Trousseau, observant les gosses qui courent sur les toboggans sous les yeux distraits des mères bavardes, je comblais le vide, une cigarette aux lèvres. Il déboula derrière moi, me demandant l’autorisation de s’asseoir. Je lui offrais un peu de tabac tandis qu’il me racontait ses frasques. Il s’était fait dépouillé par des gars rue de la Roquette, qui lui avaient piqué dix euros. Il avait besoin de s’épancher, j’écoutais, le questionnais. Il vivait dans un hôtel miteux, non loin de là, un de ces meublés sordides qui se transforment parfois en mouroir. Tous les jours, il cherchait de quoi se nourrir et fumer. Parfois, il faisait la manche. Mais seulement quand il avait faim. Sinon, il ne faisait pas grand-chose. Je brûlais de questions sur sa vie d’avant, et ma curiosité ne le gênait pas.

-Je n’ai rien fait de ma vie. J’ai 50 ans et je n’ai rien fait. J’ai toujours été nul en tout. Jacques, roi des nuls !

 

 

 

 

  Jacques NB

 

 

Je le photographiai ; Il était touchant, à recoiffer ses longs cheveux blancs puis à prendre ainsi la pose, les mains bien calées sur ses genoux, comme un enfant.

Il me demanda un peu d’argent pour les photos.

-       - Comme ça, c’est un peu comme si j’avais travaillé !

 

 

 

 


 

Jacques sur le banc

 

 

 

 

 

Jacques clope


 

 

 

 


 


 


 

 


Publié dans Les gens du dehors

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